–> attention, article long, très long <–
Ça y est ! Je suis de retour de l’Aconcagua ! Enfin, je suis revenue il y a 2 mois…mais j’ai fait traîner l’écriture de cet article 🙂
Après des mois de préparation, une crève de dernière minute, des tests et re-tests d’équipement, des larmes, du sang, des doutes, des sourires, du bonheur et des longues ascensions dans le noir, me voilà au sommet ! 7000 m…enfin presque…6962m pour être exacte ! Il y a quelques années, l’Aconcagua mesurait 7021m et puis les nouveaux outils modernes nous l’ont rabaissé un poil en-desous de 7000. Cela reste haut, très haut.
On ne part pas grimper l’Aconcagua, surnommée the Mountain of Death (la montagne de la mort) en tongs et sans préparation !
Dans mon autre billet, je vous en ai parlé, mais pour une montagne comme celle-ci, 6 mois de préparation très spécifique sont à prévoir : aller à la gym, faire du spinning ou du Body Pump, des randos le week-end, un cours de kick boxing ici ou là, ne suffit pas !).
Bref……je vous ai partagé pas mal de photos sur mon compte instagram @valerieorsoni mais je vous dévoile les dessous de l’expédition ici.
Tout démarre à Mendoza au coeur du pays du vin argentin où j’arrive après un vol via Panama (le canal vu d’en haut est superbe).
J’y retrouve Ksénia, ma guide de l’Elbrus devenue amie. Nous passons quelques heures dans cette ville sans charme (elle a été 100% détruite en 1865 par un tremblement de terre) pour faire quelques achats touristiques, vérifier l’équipement, déguster un dulce de leche, et obtenir le fameux sésame : le permiso (permis) pour entrer dans le parc de l’Aconcagua et avoir le droit d’escalader ce colosse de pierre.
Le lendemain, c’est le départ pour Penitentes (2300m), première étape, sans charme elle non plus, d’une aventure qui va être très belle. Penitentes est une station de ski décrépite, en mode post-crise économique située le long de l’autoroute qui relie l’Argentine au Chili. L’endroit est beau mais d’un bruyant ! Bref, une marche d’acclimatation à 2300m et une nuit blanche plus tard, nous laissons derrière nous cet endroit qui ne vaut pas le détour.
Cette fois-ci, c’est la bonne, nous entrons dans le fameux parc de l’Aconcagua ! Nous faisons viser une première fois nos permis (interdiction de les perdre pour les têtes de linottes comme moi), on nous donne un sac plastique en nous disant, ne le perdez pas, c’est pour vos déchets, si vous ne le ramenez pas, c’est $300 d’amende. Ça commence fort.
Nous confions nos gros sacs d’expédition à des mules qui vont nous les porter jusqu’à 3400m, au camp de Confluenzia. Une marche courte mais où le souffle commence déjà à se faire sentir, et nous voyons nos premiers dômes et tentes permanentes. Rien de tout cela pour nous puisque nous sommes parties en mode “à la dure” : sans guide local et sans luxe. Nous montons donc notre tente et nous nous installons. La nourriture est excellente et cela met du baume au coeur. Le lendemain, nous restons au camp et partons marcher jusqu’a 4400 m (Plaza Francia) puis redescendons. C’est cela le fameux processus d’acclimatation : on monte, on redescend, on monte plus haut puis on redescend, on monte dormir tout en haut et on redescend, etc….. Pas évident pour le moral mais excellent pour la santé et pour le taux d’oxygène dans le sang.
Après 48h passés à 3400m, nous prenons la direction du camp de base situé à 4400m. Huit d’heures d’une marche qui nous mène au fin fond d’une vallée interminable mais aux couleurs et aux textures d’une beauté à couper le souffle….d’ailleurs, il est bien coupé ce souffle ! Lors de passages de rivière pieds nus pour ne pas tremper les chaussures, l’eau est glaciale (mais cela fait presque du bien dans cette chaleur infernale). À chaque tournant, la masse impressionnante de l’Aconcagua nous domine et nous attire comme un aimant.
Le camp de base de l’Aconcagua est un vrai village ! Des camps super classe avec tout le confort (douche, tente déjà montée, chef cuistot, douche, massage etc…), des groupes de tentes basiques (comme la nôtre), une tente restaurant qui vend des cigarettes et du coca (et oui, il y a des gens qui vont fumer jusqu’au sommet, hallucinant !). Il y a même une tente “massage” !
Nous montons notre tente et allons dîner dans la tente restaurant de notre camp simplissime. La nourriture est infecte ! À tel point que je trouve deux asticots dans ma soupe. Ça calme. Pour moi, en montagne, la nourriture est le nerf de la guerre alors là….en plus, je tombe malade…l’altitude, l’eau même filtrée, la nourriture dégoûtante auront eu raison de mes intestins. Et bien sûr, pas de toilettes….n’allez pas vous imaginer le grand luxe hein ?!? Bref…..c’est assez faiblichonne que je pars le lendemain pour le camp 1 à 5000m. C’est simple, j’ai failli jeter l’éponge à ce moment ! Mais je résiste et grimpe puis reviens et fonce au contrôle médical où le médecin du Camp de Base vérifie notre saturation en oxygène, notre rythme cardiaque et nos poumons. Stressant mais ça va, je suis apte !
Pour nous récompenser, avec Ksenia nous allons à la tente resto d’un autre camp nous offrir un steak avec une orange (les fruits sont très rares à cette altitude). Un pur bonheur des papilles…le tout accompagné de yerba maté. À cette altitude, la notion de plaisir est modifiée : on ne veut pas d’une Rolex mais d’une orange, pas d’une nouvelle robe mais d’une douche, etc…
Le lendemain, nous repartons, cette fois-ci pour dormir au camp 1 puis au camp 2 puis…vous l’aurez deviné, nous sommes sensées redescendre au Camp de Base pour parfaire notre acclimation. Seulement voilà, il se passe trois choses :
- nous sommes en pleine forme et nous sentons prêtes pour continuer et faire l’ascension plus tôt que prévu
- il y a une fenêtre météo idéale après des mois de rafales qui ont raison des plus forts (y compris de l’équipe Red Bull)
- nous rencontrons le mythique Alex Abramov (9 Everest, fondateur du 7 Summit Club) qui va poser un de mes bracelets au sommet et me dit “va le chercher”
Alors nous décidons de ne pas redescendre mais de demander à un porteur adorable si quand il revient du camp de base il peut me ramener mes crampons et autres éléments laissés en bas.
C’est donc avec quatre jours d’avance que nous nous lançons un matin à 4h à l’assaut du colosse de pierre, l’Aconcagua. Il fait froid, bien froid….et après une heure dans le noir absolu, je dis à Ksenia, c’est bizarre mon pied gauche est tout froid…..en regardant, je réalise que la fermeture éclair de mes bottes d’altitude Scarpa Phantom 6000 est cassée ! Je ne suis donc plus protégée du froid avec tous les risques que cela représente. Nous décidons donc de faire demi-tour à 6000m (nous sommes parties du camp II). Le moral en berne car nous ne pensons pas pouvoir repartir, je suis à la fois énervée et dépitée.
En redescendant, nos yeux sont attirés par une lumière au loin qui vacille, frémit dans le froid, va de droit à gauche et qui n’est absolument pas sur le bon chemin. Nous tentons de nous en rapprocher et nous découvrons un homme, seul, perdu et en état assez piteux, il semble faire un oedème cérébral. Nous l’escortons sur le bon sentier, direction la mini -station de rangers. Une heure plus tard, nous voyons à nouveau sa lumière se promener à travers le camp II, à l’évidence il est perdu. Nous fonçons donc réveiller les rangers pour qu’ils le secourent et lui prodiguent les bons soins. Pour information nous apprendrons le lendemain que sa vie est sauve. Peut-être que mes chaussures m’ont lâchée pour que mon chemin croise celui de ce pauvre hère en détresse…..
Le lendemain, le moral dans les chaussettes, nous redescendons pour le camp de base à 4400m. Le sommet s’éloigne. Nous en parlons et reparlons….nous n’arrivons pas à trouver comment faire pour arriver à retenter le sommet sans avoir à allonger notre séjour.
Nous prenons un jour de repos pour nous requinquer (et prendre une douche au passage) et réfléchir à la suite des évènements. Nous ressassons les différents éléments : vents, froid, neige, fatigue, condition, etc…
Puis la décision est prise de repartir le lendemain à deux conditions : si les vents sont à + de 65 km/h, nous abandonnons et si à 15h, nous ne sommes pas au sommet de l’Aconcagua, nous faisons demi-tour (cette fameuse heure du demi-tour est très importante pour ne pas se retrouver dans le noir sur le retour). Croix de bois croix de fer….
C’est donc le re-départ avec des sacs chargés à bloc pour le camp I où nous ne faisons que passer puis le camp II où nous établissons notre tente. Au total, 7h d’ascension de 4400m à 5500m. Pas de cours d’eau à cette altitude, mais de la neige qu’il faut faire fondre (pour info, cela prend très très longtemps) et des petits plats lyophilisés (parfois succulents comme ma crème brûlée !). Après une nuit de bébé, merci Donormyl, direction le camp III à 6000m.
Le stress est à son comble…..les conditions ont l’air bonnes….nous sommes crevées mais en pleine forme mentale…..le départ est donc décidé pour 4h du matin. À 17h, après notre dernier dîner (à cette altitude, on a peu faim et soif mais moi, curieusement, je mange comme un cochonnet !!!), au dodo dans nos sacs prévus pour -40C avec le réveil à 3h du matin. En effet, en haute altitude, se préparer prend 4 fois plus de temps que sur le plancher des vaches, faire ses lacets demande un sacré effort…je ne parle même pas d’aller faire pipi dans le froid (plus facile pour les hommes, bien évidemment).
Il est 4h du matin, la nuit est noire, la lune est toute mini, nous avons nos gros sacs sur le dos (thermos, gourde, blouson et sur pantalon en doudoune, snacks, crampons et casque), la lampe sur le front….nous partons !
Notre rythme ? 80m de dénivelé/h en moyenne. Pas rapide. L’oxygène se raréfie et au sommet nous n’aurons que 40% de l’oxygène que vous respirez au niveau de la mer. A cette altitude, nous ne parlons pas en marchant….chacune dans son monde, on avance un pied puis l’autre…..on se replie sur soi-même pour oublier le froid qui grignote nos orteils et nos doigts. Chacune sa méthode pour rester éveillée et motivée (je vous ai dévoilé les miennes sur un post instagram). Après deux heures, les premières lueurs du jour apparaissent, nous pouvons éteindre la lampe frontale….nous sommes arrivées à Plaza Independencia (non, il n’y a rien, pas de bar ou autre, c’est juste le nom). Il s’agit de l’endroit où nous devons chausser les crampons pour nous attaquer au morceau de résistance : la fameuse traverse ! Un long passage à flanc de côteau à pratiquer avec son piolet, dans l’ombre de la montagne, qui monte légèrement mais non stop et qui relie deux pics…..très démotivant car apparemment sans fin. Mais la vue est imprenable et d’une beauté à couper le souffle !
C’est là que j’ai failli abandonner ! Plusieurs fois. Que je me suis relevée mentalement et que j’ai décidé que la goût amer de la défaite n’était pas pour moi…je préfère celui sucré de la réussite. Gravir l’Aconcagua est mon rêve ? Je vais le réaliser.
Au bout de l’enfer de la traverse, le soleil ! Un vrai bonheur. On voit le sommet à portée de main. Il est là ! Sur le plancher des vaches, nous rallierions le sommet en 30 min…ici ? Il va nous falloir encore 3 heures !
Au passage, Ksenia m’informe que lorsque nous avons mis nos crampons, un guide russe macho lui a dit “elle n’y arrivera jamais” (en parlant de moi). Le coup de boost que ce manque de confiance m’a donné est énorme. Merci au macho donc !
D’arrête de neige en amas rocheux, centimètres par centimètre, le souffle de plus en plus court, le corps fatigué par l’effort physique, le manque d’oxygène et la nuit courte, mais la motivation au top, nous nous approchons du sommet….il est là ! Il nous tend les bras ! Hors de question de baisser les bras.
On n’abandonne jamais ses rêves, encore moins quand il sont visibles !
De plus, les dieux des montagnes nous chouchoutent, parce que malgré les prévisions…..zéro vent !!! Oui, zéro. pas 20 km/h, pas 40 km/h, pas 100 km/h, non….zéro ! On ne gâche pas un tel cadeau !
Et à 14h30, le plaisir ultime m’envahit. Je pose le pied sur le fameux sommet du toit des Amériques, l’Aconcagua, le plus haut pic hors de l’Himalaya….et comme personne ne grimpe dans les Himalayas en ce moment, pendant quelques instants, nous sommes les femmes les plus hautes du monde !
Sentiment de dédoublement……plaisir orgasmique de l’atteinte d’un objectif qui me paraissait encore vague hier……bonheur de partager la chose avec ma Ksenia d’amour……trois photos (banales, désolée mais à cette altitude je n’ai pas pu faire de super pose)…et il faut redescendre….on ne s’attarde pas dans ces lieux en haute altitude.
Je suis tellement épuisée que je mettrais 6h pour redescendre (4h pour Ksenia). Je me traîne, je suis crevée…je veux dormir…mais on tient bon, #OnEstDesWarriors que diable !
Chemin faisant, je répète en boucle “on l’a fait, on l’a fait, on l’a fait, putain on l’a fait”. Oui, je suis vulgaire à partir de 5000m et à chaque fois que je croise le regard de Ksenia on dit en même temps “we did it we did it, we did it bitch !”.
Retour au camp III……dîner rapide….après cette journée de 16h d’effort intense…je n’ai qu’une envie…dormir ! Seulement voila…la tempête évitée nous tombe dessus…vents forts et neige au programme ! L’Aconcagua nous a vraiment fait un cadeau hier…et reprend ses droits sur une météo violente.
Le matin, dans le froid total, les doigts gelés, nous replions notre tente et repartons au camp II, puis camp I et camp de base. Je n’irai pas plus loin. Je suis épuisée……j’ai sommeil…..je dors debout…..et là, un groupe qui a réussi son ascension décide de faire la fête très bruyamment avec pétards et autre, jusqu’à 2h du matin……ça n’est pas cette nuit que je vais récupérer…ce qui est bien dommage car au réveil, une fois la tente repliée et les affaires rangées, c’est 8h d’une marche au pas de course dingue qui nous attend pour rejoindre l’entrée du parc puis 4h de route pour rallier Mendoza.
La nuit y sera courte aussi vu que mon avion est à 1h du matin. J’arrive donc à bord en mode zombie et y fait la rencontre d’un cycliste hors-norme, Julian Alaphilippe. Il a dû me trouver étrange…je suis sûre que mon cerveau à l’envers et ma tête de hérisson des montagnes ont dû lui faire peur.
Je rentre à la maison épuisée, en dé-acclimatation, mais le coeur léger d’avoir atteint mon rêve même si celui-ci fut le projet physique le plus difficile que j’ai jamais pu accomplir !
Vous aussi, donnez-vous la peine d’atteindre vos rêves…..ne laissez personne les détruire, les ridiculiser, les critiquer. Vous êtes plus fort(e) que vous ne le pensez !
Un énorme merci à mes sponsors : Oemine, Womup, LeBootCamp, Kailas.
Namaste !
Valérie Orsoni
Votre Coach Minceur & Bien-être LeBootCamp
2 commentaires
Whaoooooooo quel récit !!! j’y étais presque 🙂 Encore bravo à toutes les 2 vous pouvez êtes très fière de vous, je vous admire 😉
merci !